top of page
Rechercher

Escroqueries financières : quelles sont vraiment les chances de récupérer son argent ?

  • Photo du rédacteur: Stoil Petrov
    Stoil Petrov
  • il y a 5 jours
  • 8 min de lecture

09/12/2025 | Article | Escroqueries | Récupération de fonds


Chez NSP Avocats, nous sommes souvent interrogés par des victimes d’escroqueries sur les faux placements si leur dossier a une chance d’aboutir ? Quels sont les recours possibles ? Combien de temps la procédure va-t-elle durer ? Ou bien, combien de victimes récupèrent réellement leurs fonds ?

 


ree

Ce sont des interrogations légitimes, mais il serait malhonnête d’y répondre par un simple pourcentage ou une promesse rassurante. Nous essayerons donc de poser un cadre réaliste - de dire ce que l’on peut affirmer, ce que l’on ne peut pas promettre et d’expliquer pourquoi.

 


Quelles son les chances qu’une plainte pénale aboutisse ?

 

S’agissant des escroqueries aux faux placements, dans la grande majorité des cas, il s’agit d’organisations criminelles qui opèrent depuis des pays tiers. Les chances d’aboutissement pénal, au sens d’une condamnation pénale assortie d’une indemnisation des victimes, restent en pratique limitées. Tout dépendra avant tout de la qualité des preuves réunies, de l’efficacité de l’enquête, de la coopération entre les pays concernés et du contexte global du dossier.

 

Il faut comprendre qu’une affaire de ce type met en jeu plusieurs pays. Celui de résidence de la victime, celui des comptes bancaires bénéficiaires ou des portefeuilles de cryptoactifs, celui où sont implantés les “call centers”, celui où sont enregistrées les sociétés écrans qui servent de façade et celui où sont réellement cachés les organisateurs des schémas d’escroquerie.

 

ree

L’efficacité d’une enquête dépendra évidemment des preuves disponibles (traces de paiements, échanges avec les escrocs, données techniques, degré de traçabilité des flux financiers etc.). Plus le schéma est sophistiqué, plus la procédure nécessite de moyens et de temps.

 

Dans la pratique, s’ajoute à cela un élément décisif qui est le nombre de victimes et le montant global du préjudice.

 

Malgré la complexité de ces dossiers et le nombre très important de plaintes classées sans suite, il convient, toutefois, de souligner que, ces dernières années, plusieurs opérations d’envergure ont permis de démanteler des réseaux de faux investissements et de trading frauduleux, donnant lieu à des perquisitions, des arrestations et des saisies d’avoirs.

 

Même en l’absence de pourcentage de réussite officiel qu’il serait honnête de communiquer, le dépôt de plainte demeure la première étape indispensable pour toute victime d’escroquerie, et il est certain qu’il contribue à accroître les chances d’une issue favorable.

 

A part la plainte, quels sont les recours possibles ?

 

À côté du volet pénal, un autre levier important réside dans les actions civiles dirigées contre les établissements financiers impliqués dans la circulation des fonds. Ces recours portent sur le comportement des banques et prestataires de paiement qui ont exécuté, reçu ou traité les virements litigieux. La réglementation et la jurisprudence imposent à ces acteurs des devoirs de vigilance, de contrôle des opérations et de de mise en garde. En cas de manquement, la responsabilité civile de l’établissement peut être engagée.

 

ree

La responsabilité de la banque du client victime peut être recherchée lorsque celle-ci a exécuté des virements atypiques sans mettre en œuvre de mesures de vigilance et de mise en garde suffisantes. Les juridictions ont déjà sanctionné l’absence d’alerte sur des opérations anormales et incohérentes avec le profil du client, des virements inhabituels vers l’étranger ou une augmentation soudaine des montants transférés. Dans de nombreuses affaires, le juge a considéré que les banques doivent, dans certaines circonstances, protéger leurs clients contre des opérations manifestement anormales.

 

Les schémas d’escroquerie sont conçus de manière à ce que les fonds transitent par un ou plusieurs intermédiaires avant d’arriver dans les poches des escrocs. Ils transitent notamment via des comptes bancaires, des processeurs de paiement ou des plateformes d’échange de cryptomonnaies. Ces acteurs ont, eux aussi, l’obligation de vérifier l’origine des fonds, la cohérence des flux entrants et leur adéquation avec les déclarations et l’activité réelle de leurs clients, titulaires des comptes utilisés dans le processus frauduleux.

 

Lorsque les escroqueries impliquent des cryptoactifs (ce qui est aujourd’hui le cas le plus fréquent), d’autres voies s’ouvrent. Les plateformes d’échange sont tenues à des obligations de vérification d’identité, de détection des comportements suspectés de blanchiment et de coopération avec les autorités. Un manquement à ces obligations peut justifier une mise en cause. En parallèle, des analyses techniques permettent de tracer les flux sur la blockchain : identification des portefeuilles intermédiaires, des plateformes de conversion, des points d’entrée en monnaie fiat et des portefeuilles associés à des activités illicites. Ces investigations, lorsqu’elles sont possibles, peuvent mener au gel temporaire d’actifs ou à l’identification d’un intermédiaire responsable, renforçant considérablement le dossier civil et/ou pénal.

 

Avant de saisir un tribunal, une tentative de résolution amiable doit être menée. Certaines banques acceptent de transiger, mais très souvent leur premier réflexe sera de dire qu’elles n’ont aucune responsabilité quant aux pertes subies par leur client. Lorsque l’amiable échoue, la voie judiciaire peut être envisagée. Il faut le dire, la jurisprudence actuelle n’est pas stable, mais de nombreuses décisions ont été rendues en faveur des victimes ces cinq dernières années. Dans plusieurs affaires, les banques ont été condamnées pour défaut de vigilance et de mise en garde, ainsi que pour ne pas avoir réagi à des signaux d’alerte pourtant évidents. Si l’issue n’est jamais garantie, ces décisions démontrent que les actions civiles constituent une option sérieuse pour les victimes d’escroquerie.

 

Combien de temps dure la procédure ?

 

L’autre question qui revient systématiquement concerne les délais. Combien de temps faut-il compter après un dépôt de plainte pour une escroquerie financière internationale ?

 

ree

Dans la pratique, il faut souvent entre 6 et 18 mois pour obtenir une première réponse du parquet quant à l’orientation de l’affaire. Celle-ci peut être classée sans suite, transmise à un autre parquet ou faire l’objet de la saisine d’un juge d’instruction. Lorsque l’enquête donne lieu à une instruction, les délais s’allongent. Trois à quatre ans, parfois davantage, ne sont malheureusement pas exceptionnels dans les dossiers les plus complexes.

 

Quant au recours civil, notamment contre les banques émettrices des virements en cas de manquement à leurs obligations de vigilance, d’alerte ou de mise en garde, un procès civil en première instance dure en moyenne entre 18 et 24 mois. En cas d’appel, il faut généralement ajouter un à deux ans supplémentaires.

 

Combien de victimes récupèrent réellement leurs fonds ?

 

C’est, de loin, la question la plus délicate, et la plus dangereuse si on y répond avec légèreté. À ce jour, aucun organisme public ne publie de statistiques globales fiables sur la proportion de victimes d’escroqueries financières qui arrivent à récupérer tout ou partie de leurs fonds.

 

Plusieurs raisons l’expliquent. D’abord, de nombreuses victimes ne portent jamais plainte, par honte, par découragement ou par perte de confiance dans le système en général. Beaucoup ne sollicitent même pas d’avocat et préfèrent encaisser le choc et tenter de tourner la page, et certaines engagent des démarches mais finissent par les abandonner en cours de route. Ensuite, les informations sont éparpillées. Les cabinets d’avocats disposent de leurs propres données, les banques des leurs, les autorités judiciaires et les régulateurs encore d’autres, sans qu’on puisse les consolider de manière exhaustive. Enfin, les procédures sont longues et leurs issues très diverses. Certaines se terminent sans récupération possible ; d’autres aboutissent à un accord amiable, dans lequel la victime récupère en général une partie de ses pertes ; d’autres encore débouchent sur un jugement accordant ou non des dommages et intérêts. En parallèle, sur le volet pénal, les enquêtes se soldent souvent par un classement sans suite, mais peuvent parfois conduire à l’ouverture d’une instruction et à d’éventuelles condamnations.

 

C’est pourquoi nous considérons qu’afficher un pourcentage de réussite (chiffre par nature ni vérifiable, ni stable) n’est pas correct vis-à-vis des victimes. Un tel pourcentage ne doit en aucun cas être présenté comme un argument commercial ou une promesse, d’autant qu’il peut être mal interprété par une personne déjà fragilisée par l’expérience de l’escroquerie. Nous devons à chaque victime un discours transparent, honnête et clair.

 

Le taux de réussite que nous pouvons calculer à partir de nos propres dossiers n’est ni une garantie, ni une norme applicable à l’ensemble des situations. Chaque affaire présente ses propres paramètres.

 

Quel est l’ampleur économique du phénomène ?

 

On nous demande également souvent s’il existe un “chiffre officiel” des escroqueries financières. Là encore, la réponse doit être nuancée.

 


ree

En France, les autorités judiciaires spécialisées estiment le préjudice annuel des escroqueries financières à plusieurs centaines de millions d’euros. Les chiffres qui circulent, autour de 500 à 600 millions d’euros de pertes par an, donnent un ordre de grandeur mais nous considérons que ces chiffres restent très en deçà de la réalité. En effet, ils ne tiennent compte que des cas recensés, c’est-à-dire des situations dans lesquelles la victime a signalé les faits aux autorités ou à sa banque. Or, un grand nombre de victimes ne déclare jamais l’escroquerie, notamment pour des montants jugés “trop faibles” ou par crainte de devoir assumer leur mésaventure.

 

À l’échelle mondiale, les organisations internationales estiment que les pertes liées aux escroqueries financières se chiffrent chaque année en centaines de milliards d’euros. L’explosion des investissements en ligne, l’essor des cryptomonnaies et la sophistication croissante des réseaux frauduleux contribuent évidemment à ce phénomène. Les chiffres restent toutefois très fragmentaires et varient sensiblement selon les sources, et tous les acteurs s’accordent à dire qu’ils ne reflètent qu’une partie du phénomène réel.

 

Pourquoi faut-il déposer plainte malgré tout ?

 

Face à ces constats (montants gigantesques et délais longs), beaucoup de victimes préfèrent essayer de “tourner la page” sans rien faire. C’est humain, mais c’est aussi ce qui alimente le sentiment d’impunité.

 

Déposer plainte reste pourtant essentiel. Sur le plan individuel, c’est souvent une condition préalable pour faire valoir ses droits. Sur le plan collectif, chaque plainte permet d’alimenter les enquêtes en cours, d’identifier des circuits financiers, de regrouper des victimes et, à terme, de justifier des moyens plus importants alloués à l’enquête.

 

Il ne faut pas négliger non plus l’aspect psychologique. Pour beaucoup de victimes, le dépôt de plainte est une étape nécessaire pour sortir de la culpabilité et de la honte, retrouver une position active et faire reconnaître officiellement qu’elles ont été trompées par des professionnels de l’escroquerie.

 

Peut-on maximiser nos chances ?

 

Même en l’absence de garantie de résultat, certains réflexes permettent d’améliorer les perspectives : réagir rapidement, constituer un dossier clair et structuré (chronologie, preuves, échanges), et solliciter l’accompagnement d’un avocat spécialisé en escroqueries financières. Ces éléments augmentent naturellement les chances d’aboutir à une issue favorable.

 

Y-a-t-il des pièges à éviter après une escroquerie ?

 

Une fois que la victime réalise qu’elle a été escroquée, un second moment critique survient : éviter la “double peine” des faux récupérateurs. Il s’agit de prétendus cabinets, plateformes ou organismes qui contactent les victimes après coup en leur promettant d’être en mesure de récupérer leurs fonds, moyennant de nouveaux paiements.

 

ree

Ces sollicitations émanent soit des mêmes escrocs opérant sous une nouvelle identité, soit de groupes liés qui ont eu accès aux informations de la victime. Il s’agit de l’arnaque à la fausse récupération.

 

De manière constante, il faut garder à l’esprit que toute personne qui vous contacte spontanément en vous garantissant une solution certaine agit, au mieux, de façon profondément malhonnête. En effet, aucun avocat sérieux ou organisme, ne démarche les victimes sans avoir été préalablement sollicité de manière expresse.

 

Par ailleurs, aucun professionnel honnête ne garantit un résultat dans ce type de dossiers. Ce serait tout simplement trompeur. Ce qu’un avocat spécialisé fera, en revanche, est d’analyser les paramètres du dossier et de proposer les démarches adaptées à la situation précise de la victime.

 

Pas de promesse, mais de vrais leviers

 

Parler de chances de récupération en matière d’escroqueries financières, c’est accepter une certaine frustration. En effet, il n’existe ni pourcentage officiel, ni garantie, ni formule magique. En revanche, des résultats concrets existent et ils ne sont pas anecdotiques : gels de comptes, remboursements, démantèlement de réseaux, jugements en faveur des victimes.

 

Le rôle d’un cabinet comme le nôtre n’est pas d’entretenir l’illusion d’un recouvrement automatique, mais de poser un diagnostic lucide, d’expliquer les voies possibles, leurs limites et de proposer une stratégie adaptée à une situation concrète.

 
 
 
bottom of page